Rencontre avec une délégation indigène du Nordeste brésilien
Le 20 octobre 2005 à la Maison des Associations, Jean-Noël et Bernard ont rencontré une délégation de quatre indigènes du Nordeste brésilien : Maya et Yaranawy du peuple Pataxó-Hã-hã-hãe, Attia du peuple Pankararu et Kroatym du peuple Kiriri. Ils étaient de passage à Genève pour faire connaître les difficultés dans lesquelles se débattent leurs peuples. Ce contact a été suivi d’une réunion publique. “Le Courrier” en a publié l’écho ci-dessous.
Les indigènes brésiliens se battent pour leurs terres
par ALEXANDRA GYÖRGY
CONFÉRENCE: Des autochtones du Nord-Est brésilien ont dénoncé hier, à la Maison des Associations, l’occupation de leurs terres ancestrales et le projet de déviation du fleuve São Francisco.
Maya, de la nation Pataxó-Hãhãhãe annonce:
«Nous sommes venus demander du secours pour nos nations»,
Accompagnée de trois autres représentants indigènes du Nord-Est brésilien, elle était à Genève, hier, pour dénoncer l’occupation de leurs terres ancestrales par de grands propriétaires fonciers (fazendeiros)
«La démarcation de nos terres situées dans l’Etat de Bahia a été ratifiée en 1937, rappelle Maya, délimitant 54100 hectares pour notre nation.» Elle explique que les terres ont ensuite été volées par l’Etat de Bahia et vendues. Depuis 1982, le cas est devant Tribunal fédéral suprême du Brésil, sans qu’un jugement n’ait été rendu. «Aujourd’hui, notre communauté est en possession de 16000 hectares seulement, qui n’ont pu être récupérés qu’avec beaucoup d’efforts, coûtant la vie à seize de nos dirigeants.»
Les autochtones du Nord-Est ont été emprisonnés et tués, et les familles séparées dans le processus d’occupation des terres. Ils ont été obligés à parler portugais et à renoncer à leurs traditions, travaillant comme quasi-esclaves pour les riches propriétaires terriens.
«Nous nous engageons aussi pour la préservation de notre culture et de notre langue, menacée de disparition», soutient Maya
Pour ce faire, les indigènes n’hésitent pas à recourir à Internet afin de s’organiser, défendre leur cause et diffuser leurs savoirs. Car, malgré la Constitution de 1988 qui stipule la préservation des traditions des peuples autochtones, ceux-ci continuent à souffrir de discriminations et de violences, également de la part de l’Etat. Ainsi, Kroatym, de la nation Kiriri, accuse l’administration régionale de la Fondation nationale des indiens (FUNAI) de vouloir gouverner son ethnie au lieu de la soutenir.
A son tour, Atia, le représentant du peuple Pankararu, dénonce le projet de déviation du troisième plus grand fleuve brésilien, le São Francisco.
«Nous appelons la communauté internationale à faire pression sur notre président Lula pour qu’ il arrête ce programme qui profite uniquement aux politiciens et aux fazendeiros.»
Ce projet entend transférer une partie des eaux du fleuve dans les régions semi-arides du Nord-Est. Les nombreux opposants, dont le Mouvement des sans terre, dénoncent entre autres les études incomplètes sur l’ impact environne mental ainsi que sur les riverains. Ils critiquent aussi le manque de planification de la distribution de cette eau déviée aux populations rurales.
«Nous appelons à des programmes de revitalisation du São Francisco, conclut Atia, car les communautés indigènes riveraines souffrent de la faim à cause de la sécheresse induite par les barrages, la déforestation et le manque de projets d’ irrigation.»
Article parut dans le journal
“LE COURRIER” du Vendredi, 21 octobre 2005